14.11.14

Dis moi d'où tu viens et je te dirai où shopper ...






Maison Château Rouge, cela vous parle? Du moins pas encore, mais c'est le tout nouveau label parisien qui vient de voir le jour, mêlant subtilement univers urbain et streetwear avec du wax. Leurs sweats et t-shirts estampillés "Château Rouge" font déjà le buzz sur les réseaux sociaux. Etre fier d'où l'on vient, de son héritage et de ses racines, car c'est bien de cela dont il s'agit. Ces notions d'appartenance à un lieu, une communauté sont des valeurs de plus en plus plébiscitées par les marques, qui s'en donnent à coeur joie. 

Il suffit de jeter un coup d'oeil au monde du streetwear actuel et notamment parisien pour se rendre compte de la force du phénomène. Rien que dans la mode dite "mainstream", prenez les marques parisiennes telles que Paris Nord, Pigalle, Defend Paris, BWGH (Brooklyn we go hard) ou encore Florette Paquerette (Sweat "Made in chez nous") pour s'en convaincre.

Maison Château Rouge n'est donc pas le premier à rentrer sur ce créneau et encore moins dans le segment de la mode dite afropolitaine ou  afro-urbaine. 
A Paris, on peut citer Le fameux label Africa is the Future, le magazine Fashizblack, qui a lancé une série de T-shirts "Made in " et  La créatrice Sakina M'sa n'est pas en reste avec ses t-shirts et sweats "Barbès mon amour" ou "Goutte d'or je t'adore". A New york, Kukua du blog African prints in Fashion séduit avec ses "african cities" bags estampillés du noms de villes africaines  et la marque Caven etomi en fait de même sur des t-shirts.
A Londres, La marque Mr Garbe célèbre aussi les villes et pays Africains et Afri Tribe l'appartenance à une tribu.










Mais pourquoi un tel engouement général autour de ces notions d'appartenance, surtout sur le segment de la mode afro-urbaine? Ce qui aurait pu n'être qu'un épiphénomène, traduit pourtant bien une réalité sociétale qui se déroule actuellement sous nos yeux.

Ce qu'il faut savoir, c'est qu'une tendance ne peut s'inscrire dans la durée que si elle répond à de réels  besoins fondamentaux exprimés par les consommateurs. Il n'est pas abusif de dire que les Africains de la diaspora d'aujourdh'ui et surtout de ma génération (j'ai fêté mes 29 ans il y'a 1 mois) vivent un réel retour aux sources, née non pas d'une campagne marketing bien orchestrée par une marque, mais née d'un manque et donc d'un besoin de valorisation de leur héritage culturel. Un besoin d'en savoir et d'en connaître davantage et surtout de le valoriser. Aujourd'hui, on vit le boom du nappysme (valorisation des cheveux crépus), de la mode africaine (explosion du nombre d'african fashion week, de marketplace afropolitains), une ouverture sur  l'art et l'esthétisme africain (Mary sibande, Toyin Odutola ou Yinka Shonibare), on entrevoit de nouveaux rôles-modèles (Richard Turere, Lupita Nyongo, Chimamanda Ngozie Adichie) et depuis 3 ans on vit un renouveau dans le cinéma de genre racontant la ségrégation raciale (avec des films tels que "Twelve year a slave", "Django unchained" ou "La couleur des sentiments" ) etc... Ce ne sont pourtant que quelques exemples parmi tant d'autres mais qui expriment bien l'idée d'un phénomène générationnel en marche bien plus grand, complexe et pluriforme. 

Effectivement, si on en est là aujourd'hui c'est bien à cause de cette génération de la diaspora, éduquée, ouverte sur le monde et fière de sa double culture. C'est bien à cause de cette génération, qui n'a pas attendu que le monde s'intéresse à eux mais qui  a décidé de créer des entreprises, des marques, des médias, des blogs  pour valoriser ce qui ne l'était pas auparavant. Une génération connectée, engagée, qui ose dénoncer des actes de racisme ou stigmatisations ordinaires en parlant d'une même voix (comme le blackface, l'absence de mannequins noirs dans la mode ou encore l'article de Elle sur la "blackgeoisie"). Une génération consciente et responsable, qui veut à son échelle contribuer au renouveau du regard porté sur l'Afrique.
C'est bien à cause de ce phénomène générationnel, combiné également à d'autres facteurs, qu'on assiste à une forme de révolution et un retour aux sources des jeunes Africains de la Diaspora. 

A l'école on m'a pourtant parlé de la fameuse génération Y dont je ferais partie, concept de sciences sociales ou concept marketing à vous de choisir. Cette génération Y serait composée de personnes nées entre les années 77 et 97, qui contrairement à leurs parents et grands parents seraient effrontés, impatients, privilégient l'épanouissement personnel à la carrière et font preuve d'altruisme. Ce sont également des consommateurs avertis et informés.
Je pense qu'il pourrait être intéressant, d'un point de vue sociologique, d'établir au sein même du concept de génération Y une strate supplémentaire  : la génération A , pour génération afropolitaine. Car cette partie de la population a son histoire propre, liée à l'immigration et à ses racines africaines, qui expliquent aujourd'hui son comportement. 

Voila donc l'une des raisons pour laquelle, selon moi, cette tendance des t-shirts sur le thème de l'appartenance rencontre l'adhésion du public, car elle touche en plein coeur cette génération. Cette tendance mode ne peut donc que se renforcer, car le succès engendre de l'opportunisme et nourrit des réflexions et actions marketing en vue de faire perdurer la tendance. 

Cela étant dit, sur une note plus légère, je vous avouerais que personnellement j'ai craqué pour le t-shirt "Barbès mon amour" et les "african cities bag" d'African prints in Fashion. Ce sac m'a suivi tout le long de mon voyage en Tanzanie, du cratère du Ngorongoro (que vous pouvez voir sur la photo ci-dessous) aux plages de Zanzibar. D'ailleurs, je vous en reparle très vite de ce voyage!




6 commentaires:

  1. Tu nous livres une très bonne analyse qui est même assez réconfortante (non nous ne sommes pas seuls!!!) pour les générations futures. Je pense à ma fille qui arbore fièrement son afro alors que moi on me rasait la tête parce qu'il fallait cacher mes cheveux et que ma mère ne savait pas comment s'y prendre pour me coiffer... On reviens de loin. J'observe beaucoup les réseaux de la diaspora africaine en général, et toute cette volonté de nous valoriser est vraiment contagieuse!
    Et sinon le sweat Château Rouge là c'est une tuerie!

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  2. Encore une analyse intelligente et bien argumentée Chayet, j'aime lire vos articles.

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  3. Ah, vraiment j'adore tes posts, toujours originaux et recherchés. Longue vie à ce blog :-)
    J'ai complètement craqué sur les sweat shirts Maison Chateau Rouge. Où est-ce qu'on peut les acheter ? Je (enfin le Père Noël) voudrais en offrir à ma famille pour Noël.
    Merci d'avance

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    1. Bonjour Chacha, merci pour les compliments!! :-)
      Il semblerait que Maison château rouge soit en cours de lancement, car leur site n'est toujours pas en ligne et pas d'activité sur les réseaux sociaux. Mais, je t'encourage à envoyer un mot en inbox sur leur page Facebook ou compte instagram, pour leur poser la question directement. :-)
      Chayet.

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  4. Tu fais vraiment du super boulot avec tes articles! Bravo!

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